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Subtil assemblage pour une œuvre immarcescible Concerto pour Guitare Classique et Trio Jazz de Claude Bolling Au métier de l'écriture, Claude Bolling associe le sens de l'improvisation. A la fois sédentaire et nomade, il est rigoureux mais libre. Il est mature mais frais. Le " Concerto pour Guitare Classique et Trio Jazz " est l'un des exemples les plus heureux de cette dichotomie. Sons pincés et notes frappées s'entrelacent délicatement, sans qu'il y ait jamais conflit d'intérêt. Un exploit, car la frêle guitare peut suffoquer sous le poids du " digitodrome ". D'ailleurs, peu de compositeurs se sont frottés à l'exercice (mis à part Mario Castelnuovo-Tesdesco dans sa délicieuse " Fantaisie "). Elégante mais puissante, cette œuvre - peut-être devrait-on dire chef-d'œuvre - est une suite dont chaque mouvement est un rebondissement, dont chaque aspérité cache un trésor, dont chaque parcelle procure une émotion. Un vrai régal ! Initialement élaboré avec le regretté Alexandre Lagoya, le Concerto s'est enrichi d'un mouvement (" Finale ") à la suggestion d'Angel Romero, suite à une représentation donnée à Pasadena avec George Shearing. Pour ma part, c'est en 1978, au Théâtre de la Porte Saint-Martin, qu'en compagnie de l'auteur j'ai présenté l'œuvre au public parisien (œuvre qui elle, ne vieillit pas). S'en est suivie une tournée en province. Pourtant, n'osant imposer au vénérable compositeur le rythme frénétique de mes tournées (à l'époque), j'ai appelé différents musiciens à la rescousse, un peu partout dans le monde. Et je ne l'ai pas regretté. C'est ainsi qu'à San Francisco, le Concerto a marqué l'inauguration de l'Alliance Française. Mon pianiste était alors un émule de Ray Bryant, d'autant plus enthousiaste qu'il y voyait une continuation de l'inspiration de son maître. Le grand pianiste classique Bernard Ringeissen - unique élève de Jacques Février - m'a accompagné à Taiwan où, à la Maison du Peuple, nous nous sommes produits devant 3000 nationalistes, totalement débridés pour l'occasion. Avec une autre virtuose, Thérèse Dussault, nous avons amorcé, grâce à cette œuvre contre-révolutionnaire, la perestroïka, tout d'abord dans la célèbre Salle Tchaïkovski à Moscou, puis dans une immense tournée au travers d'un empire dont on ressentait déjà les craquements. A l'Université de Columbus, dans l'Ohio, le joueur de piano bar qui me donnait la réplique avait une telle capacité d'improvisation que le Concerto fut totalement méconnaissable, et pourtant magnifique ! (Mais si, mais si, Claude, je te rassure). A Curaçao, ce subtil cocktail de musique classique et de jazz secoua un public ô combien bigarré. En 1989, j'ouvris le Festival de Houston (300.000 spectateurs), en jouant " la Marseillaise " à la guitare seule, puis notre Concerto en compagnie de trois incroyables musiciens texans (dont un contrebassiste noir, ce qui en soi était un événement). La " Duke Ellington School of Music " à Washington, sanctuaire de la musique improviso/écrite, fut une autre expérience inoubliable. En Afrique du Sud, la reprise des échanges culturels avec la France en 1991 fut célébrée par le Concerto. Nous y réconciliâmes blanches et noires. A Cuba, le Concerto fut nettement mis à la sauce salsa, mais me valut une invitation de l'Orchestre Symphonique National pour l'interprétation d'une autre œuvre du répertoire français : le Concerto pour Guitare et Orchestre Symphonique de Jacques Castérède. Au hasard de mes tournées, l'œuvre s'est montée - souvent à l'improviste - de ci de là, toujours à l'ébahissement de publics bariolés. C'est Claude Bolling qui m'a présenté Hervé Sellin, ce soir mon comparse. " Ce pianiste est unique : il allie au toucher classique un sens parfait du jazz ". Clairement l'homme de la situation ! Nous sommes passés à l'acte au Festival d'Istambul. L'accueil fut délirant, estompant auprès du public stambouliote tout souvenir de Marche ou Blue Rondo antérieurs… Nous n'allions donc pas en rester là. Destination suivante, un immense faré à Papeete. Nous ne pouvions pas nous tromper : derrière chaque Tahitien, se cache un guitariste. Umberto Pagnini, le batteur battant, était du voyage. C'est lui que j'ai récemment retrouvé par Internet. C'est lui qui a eu l'idée de ranimer notre flamme. Il fallait que ce fût dans une île, évidemment. Bon, l'île de la Jatte n'évoque pas directement l'envoûtement tahitien, mais les requins (de studio) ne manquent pas alentour. Jean-Pierre Jumez
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Jean-Pierre Jumez Guitare Ramirez - Cordes Savarez - Piano Steinway
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